Cette nouvelle a une visée hautement philosophique dissimulée par un expression qui peut parfois paraître enfantine. N'hésitez pas à donner votre avis, hein
Faites-vous plaisir :farao:
__________________________________________________La Pâquerette et l'HumainSur leur colline, les pâquerettes chantaient et dansaient en fleur depuis longtemps, lorsque les humains vinrent et découvrirent qu'il existait un trésor insoupçonné à l'intérieur de la colline. Ils décidèrent de vivre avec les pâquerettes, jusqu'à ce que celles-ci leur apprennent les secrets de ce trésor. Les pâquerettes ont toujours été des animaux minéraux très bavards. Ainsi, lors de la première soirée, les humains apprirent à danser. Lors de la seconde soirée, les humains apprirent le respect de l'autre. Mais cette soirée-là était très arrosée, et le lendemain ils avaient oublié comment respecter. Lors de la troisième soirée, alors que ses congénères apprenaient auprès des pâquerettes comment utiliser la force du Soleil, le chef des humains, autoproclamé, vint voir la pâquerette la plus grande, et lui dit : « Holà, jolie pâquerette ! Conte-moi, je te prie, les mystères de cette colline et de son trésor insoupçonné ! » « D'accord, répondit la pâquerette, amusée de la franchise de cet homme qu'elle trouvait par ailleurs charmant, je vais tout te dire. », et la pâquerette raconta au chef des humains tous les secrets pâquerettesques de la colline.
Dès que la pâquerette eut terminé son récit, l'humain de tête la prit par le cou, et le lui tordit. Ensuite, il alla tordre le cou à plusieurs autres pâquerettes, et il les assembla dans sa grande main. Ainsi, il disposait d'un outil relativement solide, la cohésion des pâquerettes mortes étant assurée par ses mains calleuses. Il prit cet objet, et il creusa le sol avec. Rapidement, la terre s'effrita, et l'humain put récupérer des morceaux de terre, qu'il utilisa avec ingéniosité afin de renforcer son outil. Ainsi, petit à petit, il parvint aux bassesses qui servaient de fond à la Terre, qu'il transperça.
La chaleur le submergea, et rapidement il suffoqua. « Ainsi, pensa-t-il, les dires des pâquerettes étaient véridiques : l'Enfer est bien situé sous cette colline... » Galvanisé par la puissance de l'espèce humaine, qui était capable de franchir les limites du monde, pour trouver le lieu où se trouvaient les âmes des défunts après leurs mauvaises actions, il grimpa pour rentrer à la surface, réfléchit un instant : « Soit j'avertis mes compatriotes, et dans ce cas je dois partager le trésor que je trouverai, soit je poursuis seul, auquel cas je deviens le roi de toutes ces contrées, régnant même sur les autres humains, qui devront me baiser les pieds en signe de soumission. Soit. Je continue seul, c'est bien plus intéressant ! »
Il reprit son outil en main, et de nouveau il descendit en ce lieu suffoquant qu'il avait nommé Enfer d'après les indications de la grande pâquerette. Mais lorsqu'il fut arrivé à la pierre qui était son point de repère, il trouva, avec surprise, des millions de pâquerettes, vêtues de chaînes, de casques, portant des armes dorées, ou des projectiles enflammés.
La bataille, inévitable, eut lieu, les pâquerettes, souhaitant venger leurs sœurs, affrontant ensemble, soudées, l'humain, seul, qui souhaitait protéger un lieu qui en rien ne lui appartenait mais qu'il considérait sien, qui était plus le terrain d'un Dieu que le sien. Il ne possédait pas d'armes, car il ne savait pas ce que c'était, et car il avait brisé son outil pour creuser peu avant. Il ne possédait pas de vêtements, car il ne savait pas ce que c'était. Il ne possédait pas de compagnons, car il avait préféré le profit potentiel unique à la forme de communauté.
Rapidement, il fut submergé par les petites pâquerettes, qui avaient privilégié le nombre à la force personnelle. De son côté, l'humain, malgré à sa force naturelle supérieure à celle de la pâquerette « standard », ne pouvait cautionner un tel nombre de parasites. Puis l'humain eut recours à une technique qui lui est propre : le baroud d'honneur. Quelle que soit l'espèce animale, lorsqu'elle s'apprête à mourir, elle meurt, se résignant à son sort. Alors que l'humain, lui, tenta d'utiliser le feu des projectiles pour non pas seulement se protéger des pâquerettes mais également les tuer par la même occasion, mettant feu à son propre corps.
Cette attitude mena à une mort rapide de l'humain, dont l'âme quitta ce corps pour rejoindre l'Enfer, car sa vie était mauvaise. Contrairement à ses pensées, l'humain n'était pas en Enfer lorsqu'il est mort, car l'Enfer est, quoi que l'on puisse dire, toujours plus profond qu'on le pense, pensait et pensera toujours. Un jour, l'humain découvrit l'Enfer, et il découvrit cet Enfer dans un lieu assez peu imaginé pour abriter la lie de l'espèce humaine, bannie des Dieux et abandonnée de tous les autres habitants de la planète Terre. Cet Enfer, il le découvrit à ses pieds, car il était en haut d'une montagne lorsqu'il reçut l'illumination qui le conduisit à transporter son esprit en dehors du domaine habituel des Songes. Cet Enfer, c'est la civilisation humaine, et l'espèce en en générale. Ce fut ce qu'il pensa.
Mais un jour, que l'humain ayant perdu foi en l'humanité et n'ayant jamais eu le cœur d'annoncer sa découverte aux autres humains, marchait en haut d'une étrange colline dont le sommet était orné d'un petit trou, sorte de terrier gigantesquement profond, il vit une pâquerette. « Bonjour, jolie pâquerette, dit-il. Comment vas-tu ? » « Je vais bien, lui répondit la pâquerette au grand étonnement de l'humain. Que veux-tu, humain éclairé ? » « Je voudrais vivre avec toi, jolie pâquerette, dit-il après quelques instants de réflexion et de souvenir de son animosité de l'espèce humaine. J'aimerais apprendre à vivre comme une pâquerette. Penses-tu que cela soit possible ? » « Je ne sais pas, dit la pâquerette. Mais on peut toujours tenter. » L'humain défit alors ses chaussures, son pantalon, sa chemise, sa cravate, sa montre, son chapeau, ses lunettes, son crucifix, ses chaussettes, ses sous-vêtements, et creusa un trou dans lequel il se planta lui-même.
« Non, dit la pâquerette. Tu commences mal : tu ferais mieux de faire appel à ceux qui ne sont pas loin et qui voudront bien t'aider sans rien demander en retour. Ainsi, tu seras plus intelligent. »
L'humain obéit à la pâquerette, et il demanda son aide à un rocher voisin et à son amie la jolie pâquerette. Les deux animaux minéraux acceptèrent de l'aider, et il fut bien vite dans son trou, ses doigts de pieds sentant le douce fraîcheur de la terre. Puis, l'humain tenta de débloquer ses bras de l'emprise terrestre.
« Non, dit la pâquerette. Tu continues mal : tu ne devrais pas refuser l'étreinte de ta mère, celle qui t'a mis au monde. » « Mais, répondit l'humain, ma mère n'est pas là ! » « Ta mère, continua la pâquerette sans s'énerver le moins du monde, est la Terre, car si toi-même tu ne fus pas enfanté par la Terre, alors ton ancêtre ayant vécu auparavant le fut, ou bien son prédécesseur. L'on descend tous de la Terre, si l'on remonte assez loin dans les racines tortueuses de la famille. Tu devrais donc laisser la terre et ses autres enfants t'emprisonner les membres supérieurs. Ainsi, tu seras plus sage. »
L'humain obéit de nouveau à la pâquerette, et il abandonna ses bras mais aussi ses jambes à la Terre et son étreinte. La pâquerette le remarqua.
« Non, dit la pâquerette. Tu continues mal : tu ne devrais pas vouloir apprendre trop vite et brûler les étapes. Je suis ta conseillère, je t'ai instruit, pour devenir plus sage, de ne pas refuser l'étreinte de ta mère, en parlant de tes membres supérieurs. À moins que tes jambes ne soient placées plus haut que tes bras, tu n'aurais pas du aller trop vite en besogne. Si quelqu'un te donne un bœuf, iras-tu prendre le second et dernier bœuf de cette personne ? Si un cheval accepte que tu montes sur son dos, iras-tu le domestiquer ? Vous, les humains, vous êtes comme cela. Mais ce n'est pas le bon chemin de vie. Tu devrais donc reprendre possession de tes jambes jusqu'à ce que la Terre te les demande. Alors, tu les lui céderas. Ainsi, tu seras plus réfléchi. »
L'humain obéit, et il reprit possession de ses jambes. Les jours passèrent, l'humain ayant décidé de se limiter pour le moment à ces trois commandements, qu'il commença à maîtriser après une semaine de vie avec la pâquerette. Puis, il sentit la Terre se fendre devant lui, et le monde des humains fut emporté au loin, le morceau de Terre en quête de la vérité ayant subitement disparu. Où qu'il regarde, il ne voyait personne.
« Non, dit la pâquerette. Tu continues mal : tu ne devrais pas chercher à revoir tes anciens compatriotes. Le jour où tu devras les revoir n'est pas encore arrivé, et il se présentera à toi de façon spectaculaire, car c'est ainsi que vivent les humains qui sont idiots. Toi, tu n'es pas un humain idiot, car tu recherches la vérité là où elle ne se trouve peut-être même pas. Si tu continues à chercher ainsi, tu resteras seul, car bientôt je quitterai ce monde, te laissant seul devant ton destin, si tu ne respectes pas les commandements rapidement. Tu devrais donc t'astreindre à oublier ton passé, car la seul chose qui puisse importer est ton futur. Ainsi, tu seras capable d'avancer. »
L'humain obéit fidèlement, et bientôt il ne se souvenait plus de ce qu'il avait fait auparavant, ayant même oublié son nom. Tout ce dont il se souvenait, c'était qu'il était humain et les préceptes et commandements de son amie la jolie pâquerette. Le lendemain de son oubli, une humaine grimpa en haut de la colline où se trouvait la tête de l'humain, la dernière chose émergée de son corps. Il ne parla pas, et elle ne le remarqua pas. Elle redescendit la colline, et il fut bientôt subjugué par cette humaine.
« Non, dit la pâquerette. Tu continues mal : tu ne devrais pas voir cette humaine comme la solution à tes problèmes de solitude, car si elle peut t'apporter le réconfort, est-ce durable et sincère ? D'autant plus que, je te le rappelle, tu as voué ta vie et ton corps à la Terre et à mes conseils de vie. Tu devrais donc t'astreindre à ne pas lui répondre, si d'aventure elle désirait te parler. Ainsi, tu seras moins versatile. »
L'humain obéit aux préceptes de son amie la jolie pâquerette, et comme depuis à présent des mois il ne parlait plus, cela ne lui serait pas difficile de respecter ce commandement, s'étant lui-même inscrit dans une routine de silence. Du moins le pensait-il. Le jour suivant, l'humaine gravit de nouveau la colline et remarqua cette fois l'humain, dont seule la tête sortait encore du sol. Elle lui parla, mais il ne lui répondit pas. Elle continua, trouvant en cet humain la personne à qui parler, la personne qui comprendrait tous ses malheurs puérils et totalement futiles.
Ainsi, toutes les heures depuis le zénith jusqu'au coucher du soleil furent consacrées par l'humain à écouter attentivement les paroles de l'humaine, et à l'humaine à se confier sincèrement à l'humain. Elle lui racontait sa vie de tous les jours, ses petits bonheurs et ses malheurs amoureux, ses questions faussement existentielles, sa santé et celle de sa famille. « Ainsi, pensa l'humain, il y a encore d'autres humains ! » Comme il n'avait en réalité pas totalement oublié la destruction de la Terre devant ses yeux ébahis, savoir que cette humaine n'était pas, avec lui-même, la seule rescapée de ce désastre lui permit d'espérer de nouveau en l'espèce humaine. « Si tous les gens sont aussi gentils et attentionnés que cette humaine, pensa-t-il, alors je veux bien revenir vivre avec eux. »
Le jour de la treizième visite de l'humaine, l'humain prit la parole, faisant résonner de sa voix caverneuse l'air environnant le sommet de la colline qu'il habitait depuis si longtemps qu'il ne savait plus se défaire de l'amour qui le liait à la Terre. Alors qu'elle évoquait une réflexion quant à la Terre, il dit « Maman », et tel fut son premier mot, le premier mot d'un homme plein de renouveau.
L'humaine s'arrêta de parler, et elle fondit en larmes. La jolie pâquerette, elle, observait sans rien dire. Elle se demandait quelle bêtise humaine l'humain allait encore pouvoir faire. L'humain bougea ses mains, puis ses bras, et finalement il s'extirpa de son trou, pour se relever et prendre la main de l'humaine, qui le mena vers un village constitué de maisons de bois. Il dit bonjour à tous les habitants du village, et il leur demanda leur aide afin de construire une maison et un jardin, où il cultiverait le fruit de la Terre. Ils n'acceptèrent pas, et de nouveau l'humain se sentit tellement haineux envers cette espèce qu'il s'étendit devant son amie la jolie pâquerette, et qu'il lui dit : « Je suis désolé, jolie pâquerette, mais je crois que ma vie se terminera avant toi. Je lui mets fin, car mon espèce n'est pas digne de mon amour. »
« Non, dit la jolie pâquerette. Tu finis mal : tu ne devrais pas vainement espérer l'amour de tes compatriotes par gentillesse envers eux, mais vivre dans le respect des préceptes que je t'ai prodigués. Tu devrais savoir que cette espèce est condamnée, et que très peu nombreux sont les représentants de cette espèce qui ne sont pas avides de pouvoir et de richesses. Si tu fais cela, alors tu seras digne d'être un homme. »
L'humain écouta attentivement l'ultime conseil de son amie la jolie pâquerette, puis lui dit adieu et se rendit dans son village, où il fit rassembler tous les habitants devant une estrade qu'il s'était confectionnée rapidement, assemblant quelques planches de bois qu'il avait trouvées près de la colline. « Mes amis ! Ma vie recommence aujourd'hui, et de votre amitié si ce n'est de votre amour je veux être digne. Je possède la sagesse qu'il vous manque, alors je vais vous enseigner les commandements de la pâquerette qui vit en haut de cette colline, dit-il en désignant la colline de laquelle il venait. » Les gens, autour de lui, le prenaient pour un fou. Ils se demandaient qui était cet humain pour venir, crier autour de lui, prétendre posséder le savoir ultime et le tenir de la parole d'une pâquerette, et ils le rejetèrent. L'humain retourna voir la pâquerette, pour quérir des conseils, et il la chercha partout sur la colline. Il retrouva finalement le trou qui l'avait habité, et celui qui avait abrité la pâquerette, vides. Il eut alors l'idée de creuser de façon perpendiculaire au sol et en séparant le trou de la pâquerette en deux, comme la pâquerette le lui avait enseigné peu avant que l'humaine vienne les troubler dans leur tranquillité spirituelle. Il parvint finalement à un résultat, après plusieurs heures de labeur. Était inscrit : « Je pars : mes commandements ne sont pas utilisés à bon escient. Hélas pour toi, humain, je ne te garantis pas que tu survivras au vent de colère des habitants de cette contrée inhospitalière, comme tu l'as constaté. Adieu, humain. Adieu... »
Lorsqu'il se redressa, il vit au bas de la colline les gens du village l'accuser de sorcellerie, et ils venaient le tuer pour éviter que sa maladie se propage. Il se résolut alors à s'enterrer, de nouveau, cherchant refuge auprès de sa mère. Il ferma les yeux, et la Terre, répondant à son appel, l'engloutit à jamais dans les souterrains de l'erreur humaine, où il put rencontrer le premier humain, celui qui s'était autoproclamé chef de son espèce et qui avait creusé dans la colline. Ils ne purent parler, mais les yeux vides et pourtant dégageant une telle aura de remords du premier humain exprimait tout ce que ses mots ne pourraient décrire.
La dernière image qu'il eut du monde, avant de rejoindre définitivement sa créatrice, sa mère, la Terre, mourant par le même biais, fut ce fut un dessin de pâquerette au mur d'une caverne qu'il traversait, entraîné par la Terre, sa mère, qui l'avait toujours pris sous son aile et cela sans rien demander en retour.